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¤ Mademoiselle Yum ¤
12 octobre 2005

::: Remember :::

feep24c1Les mots me manquent. Se distordent dans ma bouche. Je voudrais lui parler mais quelque chose m'échappe. C'est que je n'ai guère pour habitude de me faire aux faux-semblants. Je ferme les yeux et j'essaie de revenir en arrière, je pense très fort aux instants délicats durant lesquels elle s'est ouverte, comme une fleur sauvage, naturellement, sans équivoque.

*Remember* et essaie de te rappeler le pourquoi du comment. Comme on dit.

Croque dans ma Pomme. Pour sûr elle n'a pas le même goût que la tienne. Mais elles sont succulentes, non ? Toutes les deux, même si leur jus a une saveur différente. Et c'est cela qui est si doux dans la Vie. Qui la rend intense et limpide.

Demain est un autre jour et demain est un autre labeur.

Ce midi je pensais à la *chance* qui est mienne de pouvoir librement parler, respirer, marcher, penser. Que tous mes sens fonctionnent bien, que rien ne lâche, que rien ne semble rouillé, pour l'instant. Alors je prenais conscience de mon imbécilité à toujours avoir peur du lendemain, à toujours divaguer sur la pire suite possible à ma Vie. Tant que tout va bien, mais que je cours, bordel !

Ce soir je suis rentrée, un SDF assis devant la porte d'entrée de mon joli immeuble XVIIème. Coloriait en peinture des paysages d'automne. Des clairières et des ruisseaux. N'ai osé le saluer, tant il semblait concentré, noyé dans son univers de couleurs. Appliqué à sa tâche.
Laissant la porte ouverte sur le couloir, j'ouvrais ma boîte aux lettres. Quand sont passés deux jeunes gens, un jeune couple de môn âge à peu près. La jeune fille, penchée sur l'homme assis, lui propose ses fraises Tagada.
" - Je n'en veux plus moi, vous les voulez mes fraises ? C'est bon ! "
Le clodo n'en crois pas ses oreilles. Heureux, il accepte d'une voix souterraine, remercie, regarde le couple s'éloigner. Et moi j'étais là, ma clé de boîte aux lettres à la main, immobile devant cette scène qui m'a paru surréaliste en ces temps où l'individualisme semble régner sur le Monde. Le sans-abri, un long moment après le passage du couple, qui s'en dit :
" Ils sont gentils les jeunes... "

Oui, parfois, ils sont gentils les jeunes. Les vieux aussi peut-être bien. Les Humains. Nous.
Parfois ils sont humains, parfois ils regardent au bout de leur nez.
Et cet instant m'a fait plaisir, comme si à moi aussi le goût unique des fraises Tagada fondait sur ma langue (affamée).

Ce qu'on a, ce qu'on connait, tout cela n'a pas de prix. Ouvrir les yeux davantage sur ce qui est si simple à offrir, découvrir, partager.


©
Sibylle Yum

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